L’HÉMATOLOGIE :
HISTOIRE D’UNE DISCIPLINE PRÉCURSEUR
L’hématologie médicale est une discipline relativement jeune puisque son développement scientifique n’a été possible que grâce aux progrès des moyens d’étude du sang, de la moelle osseuse et des ganglions. Cette relative jeunesse est peut-être une clé de son dynamisme. On doit en effet à l’hématologie des avancées thérapeutiques spectaculaires dans lesquelles elle a souvent fait figure de précurseur.
Ainsi le traitement curateur dès les années 70 de la Maladie de Hodgkin a représenté le premier modèle de guérison de maladie maligne systémique, ce terme désignant des formes de cancer non localisé. La greffe de moelle osseuse, associe aux chimiothérapies, a permis de guérir des leucémies jusque-là mortelles en quelques mois.
D’autres maladies graves, telle la leucémie à promyélocytes d’évolution habituellement foudroyante, les lymphomes, cancers du système lymphatique, ou bien la leucémie à tricholeucocytes ont vu leur pronostic transformé avec des médicaments totalement novateurs qui s’éloignaient déjà de la chimiothérapie conventionnelle, seule arme utilisée alors dans la plupart des cancers. L’un des progrès les plus spectaculaire a été le traitement de la leucémie myéloïde chronique qui, après avoir vu ses premiers cas de guérison grâce à la greffe de moelle osseuse bénéfice maintenant de traitements en comprimés que le patient prend chez lui et qui lui apporte une survie de qualité, prolongée au point que sa durée moyenne de survie ne peut pas encore être calculé et que certains patients ont pu arrêter leur traitement sans rechuter.
Les exemples de guérison ou de survie prolongée dans des maladies autrefois fatales seraient nombreux, mais l’hématologie ne s’est jamais arrêtée à la simple satisfaction du chemin parcouru. Dès lors qu’elle obtenait des résultats significatifs dans ces maladies, elle s’est posé la question de la réduction d’intensité des traitements avec un autre objectif : la qualité de vie des patients traités.
Cette dimension s’est vite intégrée dans une réflexion plus globale sur l’éthique : quelle information donner au patient ? Quelle implication de ce patient dans les choix thérapeutiques ? Jusqu’où aller dans les soins en fonction du pronostic, de la qualité de vie, voire de l’âge du patient ?
Il n’est dès lors pas étonnant de constater que le premier Président du Comité National d’Ethique ait été un hématologue, le Professeur Jean Bernard dont le rôle et l’action ont illuminé les débuts de l’hématologie française. Cependant, si l’histoire de l’hématologie reste marquée, dans notre pays par cet illustre médecin et médecin et chercheur, l’hématologie française s’est par la suite très largement illustrée au plan international.
D’autres grands noms de l’hématologie française ont acquis une telle renommée. Jean Dausset, prix Nobel de médecine pour sa découverte des groupes HLA, ouvrant la voie aux greffes et transplantations d’organes ; Georges Mathé, qui réalisa la toute première greffe de moelle osseuse ; Eliane Gluckman qui, avec son équipe mena la première greffe mondiale de sang de cordon, voie prometteuse qui dans ce cas permit de guérir un enfant atteint de la redoutable anémie de Fanconi.
La complexité des approches scientifiques de ces maladies, nécessitant le recours à différentes compétences et à des essais cliniques de grande ampleur dits multicentriques fait que, de nos jours, les noms n’apparaissent plus au premier plan laissant place à de grandes équipes qui, en collaborant entre elles au niveau national et en établissant des collaborations internationales, ont permis à l’hématologie française de se distinguer dans pratiquement tous les domaines et de participer grandement aux formidables progrès réalisés par cette discipline dans les trente dernières années.